La Fin de l'Argentique

[Thierry]

Salut à tous,

J'avais lu il y a quelques semaines un article (sur Yahoo je crois) qui évoquait la décision récente des grandes majors américaines d'équiper en masse les salles de ciné US pour la diffusion des films en numérique. Ceci bien entendu dans le but de réduire de façon considérable les coûts de projection d'un film en supprimant ainsi la dernière étape sur (la coûteuse) pellicule.

J'ai découvert également qu'une douzaine de salles étaient déjà équipées en France et 70 salles en tout en Europe (http://www.digital-cinema.org/dcinema/salles).

Cela signifierait donc la fin programmée et définitive de notre bonne vieille pellicule et entamerait une nouvelle ère pour le 7ème Art.

Je parle de cela car j'étais il y a quelques années, un fervent défenseur du support argentique trouvant sans conteste qu'il offrait une qualité d'image incomparable et une texture si particulière qui était l'essence même du cinéma.

Mais après avoir découvert la quantité impressionnante de films tournés à ce jour en numérique et n'avoir aucunement décelé la différence lors de leur projection en salle ou sur DVD, j'ai fini par me faire à l'idée que le numérique était un support comme un autre et qu'il n'enlèverait rien au savoir faire du directeur de la photographie, du cadreur ou du réalisateur. Autrement dit J'étais un grand fana de technique et je me suis, depuis, beaucoup plus intéressé à l'écriture et à la mise en scène.
Je serais peut être même désormais un farouche défenseur du numérique sachant que celui-ci serait en passe de sauver de la faillite les salles de cinéma.

La seule chose que je crains maintenant est : La souplesse et la facilité de diffusion que procure le cinéma numérique n'engendreront-elles pas un appauvrissement de la créativité ?

Bien à vous tous.

Thierry

[Nathan]

Bien sûr que oui ! La créativité va devenir de plus en plus pauvre, mais le nombre de films sera aussi de plus en plus grand ! Moins de risque, on ne compte pas le nombre de bobines à développer sans se faire engueuler par la prod'... Le numérique c'est ça. On peut aussi revoir les rushes et savoir quelle prise est bonne ou s'il faut ou non en refaire une. Après, pourquoi pas une plus grande facilité à devenir réalisateur ? Plus de films = plus de techniciens, d'artistes, non ? Ca peut être mieux pour tout ceux qui veulent réussir.
Ensuite, la pellicule, j'aime aussi. Ca a son charme un tournage en pelloch'. Mais à voir les vieux films, on comprend que ce n'est pas éternelle. Les films édités chez MK2 sont de vieux films (M Le maudit, Mabuse, ...) dont chaque image a été retouché parce que les pellicules étaient trop vieilles et abimées. Le numérique est aussi un moyen de garder intact un film... (et les drops ?)

[PoLo]

Ceci dit quand on parle de MK2 il faut savoir que Marin Karmitz souhaiterait pouvoir diffuser les films indépendants en vidéo (de piètre qualité) afin d'élargir la diffusion (voir le scandale Mysterious Skin)

La différence entre argentique et numérique est loin d'être anodine (latitude d'exposition, rendu des hautes lumières, grain,...) mais l'on peut parfois être suffisamment pris par le scénar pour ne pas faire attention à l'image. En effet, même si je suis très intéressé par l'image je sais que si je m'y suis intéressé pendant un film ça veut dire que je n'étais pas pris dans l'histoire car c'est quand on prend de la distance par rapport au film que l'on peut étudier l'image. Donc avec un bon scénario on peut même tourner en dv si c approprié à l'histoire...

Je préconise comme beaucoup le tournage en argentique avec post prod numérique afin de garder la qualité de la pellicule

[seventy]

J'amène un peu d'eau au moulin.
Pour rassurer Thierry, je ne pense pas que le numérique va engendrer un appauvrissement de la créativité, ni faire exploser la créativité.
Après tout que ce soit la pellicule ou le numérique, tout est une question d'idées, d'histoires et d'expressions, le support importe peu.
La caméra ne sert qu'à enregistré avec plus ou moins de réussite ce qui est devant l'objectif (et c'est valable pour les images de synthèse avec l'ordinateur).
Et pour l'instant, si on parle de cinéma en salle, ce qui fait qu'un film existe, c'est avant tout son histoire et les personnages qui la porte auquel on s'identifie d'une manière ou d'une autre. Si on se place du point d vue de ceux qui fabriquent les films et les diffusent, il y a des changements d'habitude, une adaptation aux nouvelles technologies, mais au final le travail de pensée est tjs aussi important peu importe l'outil.
Ce que je regarde avant tout c'est un film, une fiction, que ce soit en numérique ne change rien, c'est plutôt d'un point de vue économique et industriel que cela change.
le film n'a pas tué le théâtre, à chaque fois qu'un nouveau support émerge, cela permet à l'ancien de retrouver ses propres spécificités en retournant à ses origines, voire la modernité des films des frères lumière...

[Thierry]

En fait je suis relativement d'accord avec vous tous sur le fait que le support ne changera rien (ou presque) à la façon de faire un bon film, c'est à dire un bon scénario, une bonne mise en scène, un bon montage une bonne bande son, etc...

Ce que je crains en fait (vous allez voir, c'est un peu tiré par les cheveux), c'est que la réduction des coûts de diffusion en salle ne tente les distributeurs à être moins regardants (moins sélectifs) sur la qualité des oeuvres. D'ici quelques années, les dirigeants des chaînes des grands complexes cinématographiques (s'ils existent encore) n'auront qu'un seul clic à effectuer pour instantanément diffuser un film dans plusieurs milliers de salles. L'investissement et donc le risque de perte financière étant considérablement réduit, peut-être ceux-ci seront-ils tentés de bâcler leur programmation et de nous servir à outrance du cinéma pop-corn sirupeux, bref de nous resservir la soupe télévisuelle sur grand écran.

Thierry.

[Matthieu]

Le numerique ne change en rien la mise en scene scenario, creativité etc... aujourdhui sortir une camera HD coute aussi voir plus cher qu une camera 35mm.

pour la diffusion je ne cromprends pas trop vos craintes ...

[karl]

Le numérique tue la créativité en tuant d'abord la spontanéité, qui est (ou était ?) indispensable a celle-ci.

Le meilleur exemple, avant la vidéo, est celui de la photo, où prendre une photo ne veut plus rien dire, on peut la rater, ce n'est pas grave ! Et il est là le problème ! Une photo n'a plus de valeur, ou moins (pour modérer un peu).

Et ceci est valable pour beaucoup de choses, la musique aussi par exemple qui a radicalement changé depuis l'apparition de l'informatique ! La composition est désormais plus tournée vers le traitement sonore (numérique bien sûr) que vers la musicalité elle même.

Karl