Pour beaucoup, le premier film de ce mouvement est Le Cabinet du docteur Caligari de Robert Wiene en 1919. Cependant, il commence au cinéma six ans plus tôt avec un film du Danois Stellan Dye, L'Etudiant de Prague, racontant l'histoire d'un dédoublement d'âme.
Le mouvement apparaît à la fin du XIXème siècle en France par des peintres comme Vincent Van Gogh et arrive rapidement en Allemagne. Au cinéma, l'expressionnisme est issu de certaines recherches picturales et théâtrales apparues en Allemagne à la fin de la première guerre mondiale. Le mouvement s'intensifie avec la défaite, lors de la naissance de la République de Weimar, le pays est alors humilié.
Les caractéristiques :
- L'utilisation des faux décors en studios. Tous les films de ce mouvement sont tournés en studio, exception faite de Nosferatu de Murnau.
- Les lignes obliques (escaliers, fenêtres, portes) et les courbes (arches) prédominent et ont pour but de créer une forme d'angoisse.
- Les jeux d'acteurs, le maquillage exacerbent (les mouvements des acteurs sont saccadés).

Le testament du Docteur Mabuse
- Les lumières sont expressives, utilisation de l'ombrage et du clair-obscur.
- La pellicule peut-être teintée (exemple : Le dernier des hommes).
- Les sujets sont morbides (Nosferatu), pessimistes (Le dernier des hommes) et fantastiques (Faust) ce qui représentent l'état psychologique de l'Allemagne.
- Les angles de caméra sont recherchés et on utilise des caches afin de créedr un nouveau cadre.
- Beaucoup de contrastes : noir et blanc, l'oblique et la courbe, le monde naturel au monde surnaturel, le bien et le mal, ...
Deux grands réalisateurs de ce mouvement :
Friedrich Wilhelm Murnau : Très cultivé, féru de peinture et de poésie, sensible à cette hantise des "arrières mondes" propre à l'esprit Allemand, Murnau a extrait un chef d'oeuvre noir : Nosferatu, eine symphonir frd Grauens, librement basé sur le livre de Bram Stoker, Dracula (très bon livre d'ailleurs). Il transpose d'autres classiques de la littérature et réalise Tratuffe en 1926 et Faust, la même année. En 1924, il tourne Le Dernier des hommes (Der letzte Mann) qui mélange très audacieusement réalisme et expressionnisme. Il meurt en 1931 à Beverly Hills, d'un accident de voiture.

Friedrich Wilhelm Murnau
Si Murnau est le poète de l'expressionnisme, Lang en est l'architecte.
Fritz Lang : Réalisateur de la série des Mabuse (Mabuse, le joueur ; Mabuse, le démon du crime ; Le Testament du docteur Mabuse ; Le diabolique docteur Mabuse) où il amène la mystique nietzschéenne : la volonté est le principe du monde, de la gigantesque fresque de la mythologie germaine autour de Siegfried et de sa femme Kriemhild (Les Nibelungen : La mort de Siegfried et La Vengeance de Kriemhild), des films d'anticipations (Metropolis), ou encore de science-fiction (La femme sur la lune), Fritz Lang est obsédé par la lutte du bien contre le mal. Son oeuvre Allemande culmine avec son film de 1931, M, premier film sonore du réalisateur. La vision de Lang est une des visions les plus pessimistes du cinéma. Lang ne travaille pas à l'inspiration ou à l'improvisation. C'est un constructeur qui sait l'importance que le détail apporte à l'ensemble du film.

Trois grands films du mouvement cinématographique :
DAS KABINETT DES DOKTOR CALIGARI (Le Cabinet du Docteur Caligari) de Robert Wiene.
NOSFERATU, EINE SYMPHONIE DES GRAUENS (Nosferatu, le vampire) de F.W. Murnau.
M (M le maudit) de Fritz Lang.
Le mouvement du corps :
Dans l'expressionnisme, le mouvement le plus particulier est celui de l'acteur. Celui-ci a des gestes brusques. Le mouvement se déchaîne au service de la lumière. Ce que l'expressionnisme allemand veut, ce n'est pas un mouvement fluide et ordinaire mais, par le mouvement, faire d'un corps une obscure vie marécageuse où plonge toutes choses, soit déchiquetées par les ombres, soit enfoui dans les brumes.
La fin de l'expressionnisme Allemand et la montée du nazisme... :
En 1933, Lang réalise le Testament du Docteur Mabuse, véritable référence à Mein Kampf écrit par Hitler en prison. Dans le film, le protagoniste, sous hypnose, accomplit les volontés de son maître, le "démon du crime" Mabuse, interné dans un hôpital psychiatrique. Ce film "voulait montrer, comme une parabole, les méthodes terroristes d'Hitler." (Fritz Lang)
Le film est interdit par Goebbels qui propose tout de même au cinéaste la direction de la production cinématographie du Reich. Le réalisateur part alors pour Paris alors que sa femme et collaboratrice, Thea Von Harbou, prend la place de son mari.
Le mouvement meurt en même temps que la prise du pouvoir par Adolf Hitler... Quant au cinéma Allemand, il devra attendre 1962, avec le manifeste d'Oberhausen publié par 26 jeunes cinéastes qui signe l'acte de naissance du jeune cinéma Allemand. "Papas Kino ist tod" ("Le cinéma de papa est mort) montre qu'ils veulent renoncer au cinéma d'autrefois. Ils sont maintenant influencé par la Nouvelle Vague Française. Les films Américains représentent 80 à 90% du marché Allemand et 80% du financement des films en 1977 proviennent des suventions.
Le mouvement est-il vraiment mort ?
Encore aujourd'hui, on ne peut pas dire que le mouvement est mort. Le cinéma s'en inspire toujours. Peu de temps avant que le mouvement ne meure, aux Etats-Unis, les studios s'inspirent de l'expressionnisme Allemand par la lumière. C'est le cas de la compagnie Universal. Face au succès de Nosferatu du Murnau, le studio fait réaliser par Tod Browning Dracula avec Bela Lugosi.
Tout comme les prochains films d'horreur qui suivront (Frankenstein et La fiancée de Frankenstein), la lumière expressionniste les a influencé. On retrouve les contrastes du noir et blanc. De plus, l'opérateur est un grand technicien allemand qui innova dans le travelling à la fin des années 20. Il s'agit de Karl Freund qui travailla sur Metropolis de Fritz Lang ou Le Dernier des Hommes de Murnau. Le début du film rappelle rappelle les films de l'expressionnismes Allemands : on croit avancer contre notre gré dans les différentes parties du château.
Alors que Dracula mystifie le vampire par son costume, il ouvre aussi la porte aux films d'horreurs de l'époque. Frankenstein est construit de la même façon.
Le film d'horreur amène ensuite un autre genre très différent : le film noir. Il s'agit d'un sous-genre des films policiers, à distinguer du film de détective ou de gangsters. Ce genre, plutôt que de s'intéresser au représentant de la loi ou au gangster, s'intéresse à la victime ! Le célèbre opérateur Hongrois, John Alton, qui a travaillé sur des films d'Anthony Mann comme T-Men (La brigade du suicide) ou encore Raw Deal (Marché de brutes), est influencé par l'expressionnisme Allemand : ruelles mal éclairées, docks menaçants,..., des lieux où tout peut arriver la nuit.
Ces deux films de série B tentent de "peindre avec la lumière". Anthony Mann passera deux ans plus tard aux films de série A ce qui lui permettra de réaliser des films à gros budget comme The man from Laramie (L'homme de la plaine), western en 2:35, technicolor.
Le film noir est un tout autre genre de cinéma mais s'inspire visuellement du mouvement Allemand. Fritz Lang, éxilé aux Etats-Unis après un séjour en France où il réalisa Lilliom, va par la suite tourner des films noirs. Le maître de l'expressionnisme Allemand nous offrira des films comme Human Desire (Désirs Humains), While the city slepps (La cinquième victime) ou encore Scarlett Street (La rue rouge) qui sera victime du code Hays et interdit de longues semaines dans les états de New York, du Milwaukoo et de la ville de Memphis jusqu'à ce que des protestations et des démarches autorisent le film.
Les Vampires, un héritage :
"Comment Vlad III, prince de Valachie, dont le goût immodéré pour le supplice du pal lui avait valu le surnom de "Tepes" (l'empaleur), est-il devenu, sous la plume de Bram Stoker, le comte Dracula ? Comment un seigneur de la guerre, mort au combat en 1476, contre les Turcs est-il devenu un "non-vivant", se nourrissant du sang de ses victimes ? Comment, enfin, le folklore du vampire s'est-il nourri des chroniques historiques ? Mystérieuse alchimie qui fit l'universel succès du roman de Stoker. Par lui, la légende, reprise à la scène et, surtout, à l'écran, est devenue mythe et a donné naissance à la sage du Prince des ténètres."
Mort en 1912, l'écrivain Irlandais aurait été loin d'imaginer que son livre deviendrait un classique. De cette année jusqu'en 1921, plusieurs films sortiront sur le thème du vampire. En 1921, en Honhris, sort la première adaptation du livre, Drakula. Mais il ne reste plus aucune trace de ce film. C'est un an plus tard avec Nosferatu que le livre aura un succès. Le côté pessimiste du film reviendra alors dans grands nombres de films. Le vampire craindra par la même occasion la lumière du Soleil (ce qu'on ne trouve pas dans le livre).
Le vampire sortant de l'obscurité, les lieux toujours mal éclairés jouant en priorité sur les zones d'ombre et les zones de lumières, frontière du territoire de la créature, sont l'intérêt principal des films qui suivront... L'habit du vampire ainsi que son physique seront un héritage donné par Bela Lugosi.
Pendant des années, les studios veulent faire leurs films de vampires. Christopher Lee devient une des plus grandes figures du personnage et les titres les plus farfelus dénoncent déjà la qualité du film tel que Billy the Kid versus Dracula de 1966. Dans ces mêmes années (1967), le film de Roman Polanski, Le bal des vampires ou : pardonnez-moi mais vos dents sont sur mon cou restera dans les esprits. Un film différent des autres, une comédie qui met en scène de nouveaux acteurs pour ce genre de rôle dont la ravissante Sharon Tate. J'irai même plus loin en notant un grand nombre de clin d'oeil sur l'homosexualité des Vampires. Murnau étant lui aussi homosexuel et ayant fait certaines choses dans son Nosferatu assez osé pour l'époque (le jeune Thomas qui se lave torse nu) ainsi que des signes très subtils dans son film.
En 1979, un film Allemand rend hommage au flm de Murnau : Nosferatu, fantôme de la nuit avec Klaus Kinski, Isabelle Adjani et Bruno Ganz de Werner Herzog. Il s'agit d'un remake.
En 1992, une autre adaptation du roman arrive sur le grand écran. Il s'agit de Dracula de Francis Ford Coppola. Le film se rapproche plus du roman. Le vampire ne peut pas mourir à la lumière mais l'amour entre Nina et Dracula existe (il n'en ait aucunement lieu dans le livre !). Le film ne se rapproche en rien de l'expressionnisme.
En 2001, E. Elias Merhige réalise L'ombre du vampire, un film sur le tournage de Murnau. John Malkovich y incarne le réalisateur et donne la réplique à Willem Dafoa en comte Orlock. Les autres personnages du tournage sont présents comme l'actrice Greta Schroeder, le producteur Albin Grau ou l'opérateur Fritz Arno Wagner. Bien que le film soit mauvais, qu'il y ait des libertés énormes, il reste un hommage à celui de Murnau.
L'enfant de l'expressionnisme Allemand : Tim Burton
Si aujourd'hui, il y avait un réalisateur à nommé parce qu'il s'inspire de ce courant, ce serait Tim Burton.
En 1991, il réalise Batman Returns (Batman le défi) qui est un hommage visuel à l'expressionnisme Allemand. En plus des quelques clins d'oeil au niveau du scénario comme Christopher Walken appelait Max Schrek (acteur du film Nosferatu, jouant la créature), le réalisateur s'inspire des classiques du mouvement. De plus, le film est un film très pessimiste. L'animal est moins dérangeant que l'homme ("je ne suis pas un homme, je suis un animal" parce qu'ayant goûté à une vie normale et humaine, le Pinguoin préfère retourner vivre avec ses animaux). Gotham City, qui dans le premier opus est une métropole glauque, devient une ville tournée "en studio" comme les films de l'expressionnisme. Elle fait aussi penser à la ville de Metropolis de Fritz Lang. Les imposantes statues, les rues malsaines font penser au film de Robert Wiene, Le Cabinet du docteur Caligari. Danny DeVito rappelle aussi l'étrange directeur de l'asile et son maquillage exagéré sous les yeux rappelle fortement le maquillage de l'expressionnisme. Max Shreck, en plus d'avoir son nom emprunté à l'acteur du film de Murnau, ressemble étrangement à un autre personnage d'un film. Rotwang, l'inventeur (Rudolf Klein-Rogge) dans le film Metropolis a les cheveux blancs plaqués en arrière, porte des gants en cuir et un costume sombre ou le chef de la ville, Joh Fredersen, un riche industriel, père d'un jeune homme, habillé d'un costume et qui a aussi les cheveux plaqués sont à eux deux comme Max Schreck.
Son premier film, un court-métrage de six minutes intitulés Vincent est un hommage à l'acteur Vincent Price et à Edgar Allan Poe. Mais déjà, le film retrouve les éléments de l'expressionnisme : décors travaillés qui rappellent des films comme Caligari, lumières, encore une fois très contrastés, ...
Cannes 2005 : Sin City
Il s'agit selon le magasine studio du premier film-BD. En sélection officiel à Cannes du 11 au 22 mai, il s'agit d'une adaptation ultra-fidèle. Jim Jarmush, en recevant le grand prix, annonce Robert Rodriguez comme un visionnaire. Chaque planche de la BD est composée de noir et blanc, le gris n'étant pas au rendez-vous. Seules quelques couleurs apparaissent. Le film respecte la bande-dessinée. Les contraste sont là, rappellent l'oeuvre de Miller mais aussi l'expressionnisme Allemand. La scène d'ouverture avec Josh Hartnett et Marley Shelton le montre par exemple. La lumière venant de l'intérieur de l'immeuble est surexposée et innonde le sol du balcon, alors que le ciel est noir.
