Le fléau du jeune réalisateur:la précipitation...

[le vagabond]

Ca,j'ai vu...Mais il y a longtemps.Je vais me le refaire,j'avais pas fait attention.
Ps:pas le meilleur hithcock tout de même.
La scène de présentation ne filme t elle pas l'extérieur de l'immeuble au début?Tu me dira,je chipotte...

[Thierry]

Pour en revenir à la façon de filmer, je pense pour ma part qu'il n'y a pas de règle universelle. Tout est une question de style, de goût personnel.

Par contre, en visionnant quelques court-métrages amateurs de jeunes cinéastes, j'ai remarqué que le défaut de jeunesse qui revenait le plus souvent est la prolifération abusive des plans courts, parfois sous des angles très excentriques.

N'allez surtout pas croire que j'exprime ici une certaine frustration ou une quelconque rancoeur envers la jeune génération. Bien au contraire, j'ai souvent l'impression de me retrouver dans ces réalisations lorsque moi même je bricolais mes propres court métrages à l'aide de ma caméra super 8 beaulieu. Ma principale préoccupation à l'époque était de placer ma caméra de la façon la plus originale qui soit et de multiplier les angles de vues, quitte à découper une scène en 10 fois plus de plans que nécéssaire. L'essentiel étant alors, de "montrer" au spectateur que je savais me servir d'une caméra. La mise en scène et le jeu des acteurs me paraissaient très secondaires. Ma caméra s'agitait, virevoltait autour d'eux.. bien souvent pour combler le creux du sujet.
On retrouve aussi ce défaut chez les passionnés de cinéma fantastique qui s'acharneront sur les effets spéciaux au détriment du reste.

Tout ça pour dire à la jeune génération, ne sous-estimez pas l'écriture ou la mise en scène. Essayez d'abord de filmer de manière rationnelle. Le but premier d'un film est de raconter une histoire. Un matraquage de plans n'apporte pas grand chose sauf s'il est justifié par une action intense (une poursuite par exemple)... et encore.
Bien au contraire, une caméra qui s'agite dans une scène d'exposition ou de transition par exemple, fera à coup sûr décrocher le spectateur. Je sais que cela est très frustrant pour un jeune cinéaste de devoir se contenter de "poser" sa caméra mais, un réalisateur doit savoir s'effacer pour servir son récit. Là où il fera preuve d'ingéniosité et de savoir faire c'est quand il mettra en valeur les moments clés à l'aide des moyens mis à sa disposition.

Je pense que la réalisation nécessite une certaine maturité et que le meilleur moyen de l'acquérir rapidement est de beaucoup filmer, mener ses projets jusqu'au bout, de visionner le maximum de films, de téléfilms, de court-métrages, de pubs.. et de ne surtout pas hésiter à voir et revoir les chefs d'oeuvre du cinéma.

[le vagabond]

Là,chapeau...On sent que l'expérience ne te fait pas défaut.C'est exactement ce que je voulais dire,mais je l'ai dit avec les mauvais mots apparement...Je suis tout à fait d'accord avec toi,et j'éspère que moi qui faisait si souvent cette erreur,le fait d'en avoir pris conscience m'aidera à donner plus de sens à mon image.Merci beaucoup thierry!

[Thierry]

De rien Nico, de rien.... et merci également, très flatteur .

J'ajouterais juste que le meilleur moyen d'apprendre et de progresser, est de faire des erreurs et de savoir porter un regard critique sur son travail. Personne n'est vraiment un génie dès le 1er coup de manivelle. Si on prend Kubrick en exemple, hormis son talent c'est surtout le temps passé à l'élaboration qui fait la différence. Se remettre en question, être exigeant avec soi-même est la 1ère des qualités.
Nico, je pense très sincèrement que tu tiens le bon bout. Tu as déjà compris beaucoup de choses. Continue comme ça...

Concernant ta réflexion sur la Corde, je suis d'accord avec toi sur le fait que ce n'est pas la meilleure oeuvre d'Hitchcock.

Et pour relancer la discussion, à propos des plans séquences, je voudrais parler de ce fichu plan de la fuite en voiture (van) sur l'autoroute dans la Guerre des Mondes de S. Spielberg. La caméra virevolte autour du véhicule, revient à l'intérieur pour filmer le dialogue, s'éloigne à nouveau à l'extérieur presque jusqu'au plan général. J'arrive pas à comprendre comment ils ont fait, sur le plan technique c'est impressionnant.

Thierry

[seventy]

Ah moi de te tirer mon chapeau Thierry, je suis complètement d'accord avec toi. Lorsqu'on prépare ses premiers films, il faut savoir oublier la caméra et se concentrer sur l'histoire et les comédiens. En effet lorsqu'on débute, on a tendance à penser (je crois) que tout viens de la caméra, "cet objet magique", en oubliant un peu que la caméra n'est qu'un instrument qui enregistre ce qui se passe devant l'objectif (certes avec plus ou moins de bonheurs...), or s'il ne passe rien, et bien on enregistre du rien... Lorsqu'on prépare une scène, un plan, il faut toujours commencer par mettre en scène l'action, que font les comédiens dans l'espace du décor, comment bougent ils ? Pourquoi ? Ensuite se pose la question du point de vue à adopter avec la caméra... Et non pas l'inverse...

[Thierry]

Tout à fait Seventy, et merci également pour tes encouragements (je vais finir par avoir la grosse tête ).

Tu as résumé le problème de façon très amusante et très pertinente.

Dans mon expérience personnelle, je me souviens avoir fait l'acquisition d'une caméra 16 mm, une Beaulieu à nouveau, que je vénérais comme le Saint Graal. J'étais littéralement fasciné d'avoir un tel bijou en ma possession et convaincu que celui-ci serait mon sésame d'entrée dans la profession. L'aboutissement de mon ascension.
Je m'étais ensuite démené comme un diable pour dénicher un objectif anamorphique (pour faire du cinémascope) dans une boutique du boulevard Beaumarchais.

Une fois tout ce beau matériel en ma possession et passés les premiers émois de jubilation, je me suis simplement demandé : "Et maintenant, qu'est-ce que je vais bien pouvoir filmer ? Quelle histoire je vais raconter ?". Je me suis retrouvé dans le même état d'esprit que le romancier devant sa page blanche.
Et j'ai compris que le plus dur restait à faire...
.

[Nathan]

il me semble que c'est Thierry qui l'a dit mais il est clair qu'il faut s'auto-critiquer afin de pouvoir progresser.
après avoir tourné mon premier film, mis sur bande, j'ai été tellement dégouté qu'il m'était impossible de le montrer à quelqu'un sans devoir ouvrir ma bouche toutes les dix secondes maximum pour dire ce qui n'allait pas dans tel ou tel plan parce que ça s'était moche, la musique ne passait pas, les acteurs non plus, le raccord, oups, la perche, pourquoi j'étais pas sur le pied, pourquoi ce plan séquence immobile comme les personnages complétement soporifique mais surtout pourquoi un plan séquence aussi mal cadré ! ... bref, autocritique à 300%. puis j'ai fait des films, j'ai tourné sous divers postes, j'ai regardé aussi les autres travailler, un chef-opérateur professionnel donner des conseils à la réalisatrice où j'étais assistant opérateur... je tournai une semaine après ce tournage et que ce soit la réalisation d'un jeune autodidacte où les conseils d'un pro, tout a été bénéfique pour éviter que je refasse les même bétises. mon second film est aussi loin d'être un chef d'oeuvre, il a aussi beaucoup de défauts, mais lorsque je l'ai montré à 40 personnes, j'ai eu des félicitations de gens avec qui ont ne s'apprécient pas trop et surtout, il est 1000 fois supérieur à mon premier film !

il faut absolument être critique envers son travail et s'enrichir des autres. du haut de mes 20ans, je me permet "d'enrichir" les conseils de Thierry parce que j'ai ressenti tout ça aussi. bekos !